RAPIN Pierre-André, et.al. Eglises et abus spirituels.
Genève, Editions Je Sème, 2007, 148 p, 7 €.
Présenté par Evert VELDHUIZEN.
Le « plat de résistance » de cet ouvrage collectif est certainement la contribution de Valérie Duval-Poujol. Son approche biblique et théologique solide est complétée par d’autres contributions selon les domaines de compétences des auteurs.
La problématique traitée est délimitée à la sphère du « spirituel », mais même le seul terme « abus dans les églises » aurait suffi. L’analyse porte sur les églises de tendance évangélique en Suisse. Mais personne n’est à l’abri d’abus ; que ce soit comme acteur plus ou moins conscient ou comme victime plus ou moins consentante – quels que soient le pays ou la confession chrétienne. C’est pourquoi le sujet est d’une actualité permanente pour tous les pasteurs. Les auteurs de ce livre rendent un service utile en exposant leurs analyses de manière à la fois équilibrée, bienveillante et vigilante.
Valérie Duval-Poujol se penche sur les lectures abusives des Ecritures. A juste titre, elle qualifie les interprétations culpabilisantes d’abusives. En effet, la théologie de la grâce de Dieu ne permet pas les interprétations culpabilisantes. De même, les lectures de la Bible par slogans s’écartent des vrais sens des passages pris hors de leur contexte. La théologienne insiste sur l’ô combien évidente nécessité d’étudier les passages dans leurs contextes bibliques en général et en particulier. Lire la Bible comme un manuel d’instruction fausse également l’intention des Ecritures qui ne doivent pas être réduites à de simples outils conditionnés par les besoins humains. Elles sont à comprendre comme une Parole libre du Dieu Créateur adressée aux hommes appelés à la recevoir dans la liberté créative. Abusive est encore la lecture émotionnelle - car trop subjective. Des lectures allégorisantes de la Bible quant à elles risquent de faire dire n’importe quoi au texte.
L’auteur plaide pour une lecture respectueuse des Ecritures. Puis elle aborde quelques passages précis qui sont parfois l’objet de lectures abusives. Lorsque l’Evangile appelle au renoncement, il s’agit de placer le Christ au centre et non pas de renoncer à soi-même. Lorsque l’apôtre Paul parle de nouvelles créatures, il s’agit d’hommes renouvelés et non pas d’hommes coupés de leur passé. Et lorsqu’il déclare qu’il court en avant, l’apôtre prône un processus dynamique de la vie en Christ et non pas une quête légaliste d’un idéal perfectionniste. En matière d’unité, l’auteur rappelle que celle-ci est un don de Dieu et ne s’accomplit pas dans une uniformité forcée par les hommes. Et être en paix ne signifie aucunement se taire devant les injustices. Les textes bibliques portant sur la discipline et la soumission sont parfois tordus pour imposer les uns aux autres dans les Eglises. Une notion perverse du pardon semble pouvoir servir à culpabiliser des victimes censées pardonner aux acteurs des abus, même non-repentants.
Cette étude serait incomplète si elle n’abordait pas les abus des textes bibliques portant sur l’argent. L’auteur souligne en effet qu’il n’existe aucun « truc » qui permette de s’assurer la bénédiction matérielle divine. Autre aspect incontournable ; les menaces parfois employées pour mettre la pression sur des personnes ne voulant pas rentrer dans le moule.
Cette étude, complétée par de contributions dont certaines sont plus intéressantes que d’autres rend ce petit ouvrage à la fois utile et pertinent.
Association des pasteurs de France