La Société Pastorale Suisse propose une sorte de « prise de conscience commune » des travaux menés dans différents cantons. L’essentiel émane des pastorales suisses alémaniques, mais le guide s’adresse à tous les ministres de la Confédération.
Le guide s’ouvre par un bref bilan de la situation actuelle. Les évolutions sociologiques ont radicalement changé la donne. Désormais, le pasteur travaille dans un domaine considéré comme relevant de l’espace privé. L’institution a perdu beaucoup de sa légitimité, la parole a été remplacée par l’image, l’efficacité prévaut à la vérité. Il est encore trop tôt pour déterminer si l’évolution sociale marquée par l’individualisation signifie une réelle augmentation de liberté et de possibilités d’épanouissement. Et le retour du religieux ne signifie pas un retour aux anciennes modes. Ces évolutions portent des conséquences profondes pour la compréhension des ministères.
Une partie du guide traite les conditions préalables au ministère. Les engagements initiaux des pasteurs garantissent en un sens leur liberté. Car le centre de leur activité n’est pas soumis à des exigences et des souhaits humains, mais à Jésus-Christ seul. La formation académique est indispensable. L’Etat et les Eglises ont tout intérêt à ce que les questions religieuses soient examinées et présentées de manière responsable et raisonnable. La formation doit assurer un savoir-faire professionnel propre au corps pastoral. Il est suggéré que les critères d’évaluation de l’exercice du ministère soient établis en connaissance de cause, à savoir au sein du corps pastoral.
Une autre partie aborde l’organisation du ministère. Il y est question de l’obligation de résidence, des droits et devoirs matériels. Même des détails comme la désignation des pièces utilisées pour le ministère au presbytère et l’entretien du jardin y sont mentionnés. Les paragraphes portant sur l’implication du conjoint et des enfants dans la vie paroissiale font paraître qu’en Suisse ces aspects ne semblent pas encore définitivement réglés. La collaboration entre collègues au sein de la même paroisse est traitée d’un ton idéaliste. Intéressant à cet égard est la réflexion sur le rôle du pasteur modérateur ou coordinateur ; une figure connue en Allemagne, mais qui n’a pas été adoptée en Suisse.
Que les charges du travail soient réparties selon secteur, fonction ou durée, les avantages n’empêchent pas les tensions potentielles et les difficultés latentes de la gestion des forces humaines. Les pasteurs travaillent en paroisse avec des membres des conseils élus et avec des bénévoles sollicités. Les paragraphes consacrés à la collaboration avec ces paroissiens soulignent l’importance du respect et de la confiance réciproques. Entre le pasteur et les conseillers se maintient un équilibre instable. Quelque que soient les projets et les tâches impliqués, l’adhésion et la conviction personnelles de chacun demeurent indispensables, aussi bien du côté des bénévoles que celui des pasteurs.
Le risque existe que des pasteurs se surmènent et perdent du recul. Aussi des collègues en Suisse sont amenés à compenser l’érosion des traditions et de la cohésion sociale par leurs personnes et leur travail. A ce propos, l’accompagnement des pasteurs fait objet de réflexion dans les Eglises suisses. Mais le terme y utilisé, « supervision » ne reflète pas la sensibilité française, au moins de l’intérieur. Le paragraphe sur la quantification de travail, schéma horaire à l’appuie, suggère aux pasteurs une approche pragmatique, mais il n’est pas sûr que tous s’y reconnaissent - à l’exception peut-être de ceux qui sont concernés par un ministère à temps partiel.
Le guide utilise la notion de la confiance comme élément clé des relations de travail des pasteurs. Il ne vise pas la défense d’intérêts professionnels ou la question d’organisation et d’efficacité au sein des Eglises. Il se veut plutôt une contribution à la réflexion sur l’évolution sociale et culturelle, qui touche non seulement la Suisse, mais toute l’Europe.